L'analyse de trois experts: François Hiltbrand, Fabrice Strobino et Gary Bennaim

Les biens en-dessous de 1,2 million de francs peinent à trouver preneurs à cause des nouvelles directives de la FINMA. Pour les autres, seuls les biens neufs avec une finition supérieure et très bien situés trouvent de l’intérêt, mais plus à n’importe quel prix ! De plus, les biens existants doivent répondre aux exigences en cours en matière d’économie d’énergie, sinon la décote est immédiate…

Il y autant de marchés que d’acheteurs potentiels, car tous répondent à des facteurs différents et se trouvent aujourd’hui dans des situations variées et souvent très différentes les unes des autres.

Toutefois, nous pouvons les répartir en quatre catégories distinctes :

  1. La catégorie d’acheteurs de biens jusqu’à 1,2 million de francs, a reçu un très sérieux coup de frein en raison des nouvelles directives de la FINMA (l’autorité fédérale de surveillance des marchés financiers) adoptées en hâte au 1er juin de cette année et qui rendent très difficile l’accession à la propriété pour la classe moyenne en imposant une limite de 10 % du prix d’achat financé par des fonds provenant de la prévoyance LPP (« 2e pilier »). Par ailleurs, les banques avec cette directive demandent également d’apporter au moins 10% de fonds propres autres que la LPP.

    Comme ces biens s’adressent à la classe moyenne dont le salaire mensuel médian est de 7'035 F selon l’Office Cantonal de la Statistique (OCSTAT), il est important de s’intéresser à l’aspect réel et pratique de ces chiffres. Ainsi, statistiquement, à l’âge de 40 ans environ, un couple répondant à ces critères aura accumulé environ 240'000 F d’avoirs de prévoyance-retraite avec son deuxième pilier, ce qui devrait être sa principale source d’épargne et qui sera alors principalement utilisée pour l’achat en question.

    L’article 108 de la Constitution Fédérale précisant que la Confédération encourage l’accession à la propriété, il est légitime de se demander comment interpréter cette volonté en regard des nouvelles directives de la FINMA que tout le monde politique a accepté sans broncher… Une hypothèse, voire un début d’explication, englobe en particulier le problème de sous-couverture des caisses de prévoyance, surtout publiques, et leur recapitalisation nécessaire, ainsi que le fait que les assurés qui ont retiré leur avoir du deuxième pilier, sans le rembourser, devront revendre leur bien à l’âge de la retraite. Si le marché a baissé, ils deviendront alors tributaires de l’aide publique, ce que les cotisants qui n’auront pas retiré leurs avoirs ne supporteront pas.
  2. La deuxième catégorie concerne les objets entre 1,2 million et 2,8 millions de francs. On y trouve aussi bien des villas jumelles de taille supérieure avec trois chambres que des appartements aux finitions supérieures et/ou neuves avec un environnement exceptionnel.

    Ces biens s’adressent naturellement à deux catégories d’acheteurs distincts : il y a d’abord ceux qui ont atteint un certain âge et un certain standing et qui ont vendu leur villa devenue, les enfants partis, trop grande et/ou trop lourde à entretenir. Ils recherchent principalement des appartements qui sont neufs, idéalement plus proches de la ville, qu’ils peuvent modeler selon leurs envies et répondants à des normes énergétiques et phoniques accrues. Ces objets, s’ils ne sont pas situés au centre-ville avec un beau dégagement, doivent en être proches et bénéficier d’un cadre agréable avec ensoleillement maximal et calme.

    Ce segment reste actif, car le nombre de biens à disposition reste des plus faibles.

    Il y a également les cadres supérieurs des entreprises financières ou multinationales qui recherchent une villa avec jardin pouvant accueillir la famille composée de deux enfants en plus des parents. Cela implique des surfaces comprenant trois chambres et un bureau pour environ 180 m2 minimum. Les entreprises fortement exposées à la monnaie européenne, aux marchés financiers de la gestion de fortune, voient leur effectif se réduire continuellement. Ainsi, les employés encore en poste hésitent à prendre des engagements financiers à long terme et restent dans l’attente, sans toutefois complètement disparaître.

    De plus, la politique de logements des « impatriés » (les expatriés qui arrivent en Suisse) a progressivement évolué au cours des dernières années, puisque les entreprises ne donnent plus de chèques en blanc pour plusieurs années, mais font en sorte d’attribuer un montant de soutien pour une durée bien déterminée, ce qui oblige le nouvel immigrant à faire un choix d’habitation judicieux puisqu’il sait que dans un avenir relativement proche il ne bénéficiera plus de la manne de son employeur.
  3. La troisième catégorie englobe les biens entre 2,8 millions et 5 millions de francs, c’est le segment des villas individuelles. Les acheteurs potentiels ont des professions libérales avec les plus hauts revenus ou les dirigeants immigrés.

    Cependant, ce segment de marché a évolué avec l’augmentation des prix. En effet, de nombreux vendeurs, convaincus que l’augmentation des prix s’applique à tous les biens sans exception ont augmenté leurs attentes de prix qui finalement se révèle être trop gourmandes, voire carrément hors marché. De ce fait, les objets regroupés dans cette frange de prix ne trouvent généralement pas preneurs, nécessitant d’importants travaux, parce que construits avant les chocs pétroliers successifs ou parce que les finitions ne sont plus adaptées ou encore parce que le plan est devenu obsolète sans travaux.
  4. La dernière catégorie concerne les biens de plus de 5 millions qui s’adressent à de grandes fortunes, nationales ou étrangères, attirées par les qualités que Genève peut encore défendre, notamment la proximité des liaisons aéroportuaires et de la montagne, la qualité paysagère, la sécurité, les infrastructures de loisirs, etc.

    Cette catégorie continue de présenter des objets dits « d’exception » dont le prix peut parfois atteindre plusieurs dizaine de millions de francs en raison de la taille du terrain, respectivement de la maison, mais également de son emplacement, des matériaux utilisés, des éléments accessoires et des aménagements extérieurs (piscine extérieure et/ou intérieure, tennis, manège, arborisation particulière,…).

    Sans surprise, cette catégorie continue à n’intéresser qu’un très faible pourcentage d’acheteurs potentiels, même si certains propriétaires considèrent (à tort) que leur bien doit en faire partie…

En tout état de cause, les acheteurs sont désormais plus éduqués quant aux prix du marché et aux différentes possibilités qui s’offrent à eux, ce qui évitent les offres extravagantes sur des biens autrefois quelconques et permet d’éviter les pics de prix inexplicables. Cependant, le nombre de biens à disposition reste extrêmement faible et le marché immobilier ne dispose donc pas d’une liquidité suffisante pour conserver les prix à un niveau acceptable.

Les taux d’intérêt restant faibles, la tentation de vouloir s’endetter pour acheter son « chez-soi » peut être grande, mais la tension sur les marchés et les incertitudes quant à d’éventuels restructurations poussent toutefois les potentiels acheteurs à attendre avant de prendre des risques qui pourraient se révéler inconsidérés.

Si on considère également que les banques appliquent leur standards suisses au marché genevois, une maison de Frs 3 millions devient un objet de luxe et ne peut être financé qu’à hauteur de 65%, ce qui calme également les ardeurs de certains.

Enfin, la chicanerie administrative et les recours injustifiés et injustifiables continuent de paralyser la construction à Genève, ce qui n’est pas fait pour détendre le marché immobilier dans le court terme et nous laisse penser que celui-ci, bien qu’ayant atteint un palier, n’est pas prêt de se retourner de façon importante rapidement.

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